Arrivée la veille, la seule chose que je souhaite faire, c’est enfin profiter de Los Angeles. Faut dire qu’en Suisse, on n’a pas forcément d’aussi forte chaleur en plein mois de mars. Donc peut être que pour les habitants de cette ville ce n’est pas une température assez élevée pour bronzer, mais pour moi c’est idéal. C’est pour cette raison que je me retrouve vêtue d’un petit bikini, au bord de cette piscine. On a beau être plus d’une vingtaine, personne ne tourne autour de cette piscine. Suis-je la seule qui trouve que vingt-et-un degrés c’est suffisant pour profiter de l’extérieur ? La piscine est pourtant chauffée. Enfin je ne me plains pas, je n’ai pas l’habitude de vivre avec autant de monde, donc le calme par moment ça détend. Je plonge quelques doigts dans l’eau et c’est vrai qu’elle est très bonne. Malheureusement, je ne sais pas nager. Il y a plus de montagne que de piscine à Genève, donc ce n’est pas forcément nécessaire de savoir barbotter dans l’eau par chez moi. Je me dandine jusqu’à mon transat où je pose mon postérieur sûrement pour quelques heures. Mes lunettes de soleil digne de star de télé-réalité, cliché oblige, posé sur le nez. Il manquerait presque un cocktail à côté de moi et je pourrais réellement me croire en vacances. Bien sûr, je ne perds pas de vue la raison pour laquelle je suis ici. Bien sûr c’est une compétition et durant les challenges, je vais devoir donner le meilleur de moi-même. J’espère réellement pouvoir aller le plus loin possible et c’est vrai que j’ai tendance à stresser quand je vois le potentiel des autres candidats plus beaux les uns que les autres.

Seule sur mon transat, je me sens partir vers une très longue sieste. C’est sans compter sur une voix qui me sort clairement de mon état léthargique. Je regarde par-dessus mes lunettes de soleil, bien que sa voix ne me soit pas inconnu du tout. Je le démasque dès le début. Il me ‘’traite’’ de starlette, je ne peux m’empêcher de ricaner et d’en jouer un peu, prenant une pose délibérément surjouée « Je peux t’offrir un autographe si c’est ce que tu veux vraiment. » Je retire mes lunettes de soleil que je dépose à mes côtés, sur le transat. Je ne peux m’empêcher de le détailler. J’avais bien remarqué que l’une de ses jambes étaient remplis de tatouage, mais je n’avais pas pu voir que le reste de son corps également. Il me sort de nouveau de mes pensées lorsqu’il me désigne comme miss bikini. Je vais avoir le droit à une vraie série de surnom si ça continue. Je conserve mon sourire. « Oh tu sais, ils reconnaissent seulement le talent là où il y en a. » Je me mets à rire, ne croyant moi-même pas à mes propos. J’ai été totalement sous le choc en voyant leur note. « Non franchement je ne m’y attendais pas. J’ai simplement été moi-même lors de l’entretien et apparemment, ça leur a plu. » J’en suis encore surprise rien que d’y penser. Il me propose alors de me baigner et j’hésite quelques secondes. Au bord, elle n’a pas l’air très profonde, mais j’ai peur qu’en sautant un peu trop loin, je devienne parfaitement ridicule en me noyant. Il pense que mon hésitation est due à ma crinière, je lui tire alors la langue. Quel cliché ! « Je suis coiffeuse monsieur, alors ne t’inquiètes pas pour ma touffe. » Je me lève pour m’asseoir au bord de la piscine, afin de tremper seulement mes jambes. Je me retrouve à côté des jambes de Sander et je ne peux m’empêcher de regarder de nouveau sa prothèse. « Tu peux aller dans l’eau avec ? » Bon, ce n’est peut-être pas une question qui se pose, mais je ne sais jamais quand c’est déplacé ou non. Je continue alors à le dévisager. « Il y a une signification à tous ses tatouages ? Ou c’est juste pour frimer. » Je continue de sourire, pour lui faire comprendre que je plaisante, même si je suis vraiment curieuse de connaître l’histoire de ses tatouages.

Il préfère avoir une photo dédicacée plutôt qu’un autographe. Bah tiens. J’avais oublié le côté dragueur du dimanche. « Pas de soucis, une photo tout en fourrure, ça t’irait ? » histoire d’être un peu plus habillé qu’à l’accoutumée. « Fausse fourrure, je précise. » Ça ne servirait à rien de faire du mal à une petite bête à poil. Je lui explique que face aux panels, je me suis contenté d’être moi-même. Il prend note. Tant mieux, si ça peut l’aider à remonter un peu plus haut dans le classement, j’en serais ravie pour lui. Voilà qu’il ne peut s’empêcher de faire une remarque que n’importe quel féministe pourrait trouver sexiste. Je suis faussement outré, je ne le prends pas si mal que ça. « Ne me cherche pas où je trouve le premier rasoir et je te fais un magnifique crâne d’œuf. » Je me mets à rire l’imaginer. « Le pire, c’est que je suis sûr que tu pourrais lancer une tendance. » Je m’intéresse à sa prothèse. Va-t-il pouvoir aller à l’eau avec ? Il me dit que non. Je continue mon interrogatoire, cette fois sur les dessins qui marque sa peau. Ils ont toutes une signification et je l’écoute attentivement. Je trouve ça admirable de sa part et je commence à comprendre qu’il se cache derrière l’humour et le sarcasme pour ne pas dévoiler ses blessures. J’ai une envie folle de le serrer fort dans mes bras pour le réconforter, mais je pense que dans un premier temps, ce geste est beaucoup trop intime pour que je franchisse le pas. Et puis, je sens que Sander n’est pas du genre à aimer qu’on le réconforte et aura sûrement tendance à se braquer. J’essaye de ne pas alourdir l’atmosphère et le mieux est de continuer à plaisanter avec lui. « Il reste assez de place pour placer mon prénom avec un joli cœur à côté. Ou mieux encore, pourquoi pas mon portrait en grand format. » M’imaginer sur son torse me fait à la fois rire et flipper pour le coup. « Je peux toucher ? » Je rougis, rien qu’à l’idée de m’entendre dire une telle bêtise après avoir vu ses cicatrices sur son bras. « Non, désolé, je divague. » Il me prévient qu’il va retirer sa prothèse et qu’il ne veut pas m’effrayer. Je le regarde, silencieuse. Non, je ne suis pas effrayée. Absorbée par chacun de ses gestes, je ne réagis même pas à sa boutade qui essaye de couvrir sa gêne. Il plonge dans l’eau et réapparaît devant moi, me demandant pourquoi je ne suis toujours pas dans l’eau. « Je pense que tu ne seras pas dans la capacité de me sauver si je me noie. » Je ris, mais pas vraiment. Je n’ai pas envie qu’il se moque de moi. « Je ne sais pas nager et j’ai la peur bleue de … De couler … » Il va se mettre à rire, je le sens gros comme une maison. Je n’ose même plus le regarder droit dans les yeux.

Comme à son habitude, Sander fait le beau parleur. Je rentre par moment dans son jeu et d’autres fois, je préfère simplement rire et rester silencieuse. Malheureusement, je n’ai pas autant de répartie et parfois je me retrouve déboussolé par ses propos. Comme à cet instant, lorsqu’il répond à ma boutade en disant qu’avec un manteau de fourrure sans rien en dessous, il ne dit pas non. Le dragueur du dimanche fait son come-back. Je me demande bien avec quelle autre fille de l’aventure il se comporte aussi de cette manière. Pas que je sois jalouse, loin de là, mais simplement pour voir à quel point c’est un filou. Même quand je le menace de lui couper les cheveux, ça ne semble pas plus l’attrister que ça. « On dit que toutes les coiffeuses adorent couper les cheveux, mais c’est plutôt le contraire pour moi. Donc je ne te raserais pas le crâne, mais me cherche pas où je te couperais autre chose. » Les plus vicieux d’entre vous penseront à une partie dont je tairais le nom. Quant à moi, je ne pensais qu’à sa langue. Le sujet se porte sur tes tatouages et je plaisante en lui disant qu’il resterait bien une petite place pour me tatouer moi. Il me fait alors montrer un tatouage d’une femme nue en me disant qu’il y a une ressemblance. Je ris avant de reprendre un air faussement sérieux. « Désolé, mais non. J’ai beaucoup plus de poitrine que ça et je ne me vois pas m’enchaîner à un dragon. » Je détaille un peu plus la fille en question et un sourire malicieux se dessine sur mes lèvres. « C’est qui ? Une ex qui t’a brisé le cœur ou alors quelqu’un de ta famille ? » Je ris quant à ma deuxième proposition. « Bah quoi, la consanguinité c’est peut-être autorisé en Norvège. » Quand il décide d’aller dans l’eau et qu’il m’invite à le rejoindre, je me bloque un instant et lui laisse entendre qu’il ne pourra pas me sauver si je me noie. Pas que je ne crois pas en ses capacités physique, mais c’est plutôt à cause des miennes que je lui dis ça. Son visage se crispe, je remarque instantanément la boulette que je viens de prononcer. Il essaye encore d’en rire, mais je vois bien que ça l’a touché et je préfère me taire pour ne pas m'enfoncer plus en essayant de me rattraper. Je lui avoue que je ne sais pas nager et que ça à tendance à me faire peur d’être dans l’eau et me dit qu’il est temps d’apprendre, que j’en aurais certainement besoin pour de futur shooting. Il a parfaitement raison, mais j’ai déjà tant de fois essayer, que je n’arrive pas à l’entendre. Il me rassure, en disant que je vais savoir atteindre le fond de la piscine sans me noyer. Il est peut-être temps de se jeter à l’eau. J’inspire profondément avant de me lancer, me jetant littéralement au cou de Sander. J’ai en effet pied, mais je ne le lâche pas pour autant, pétrifié à l’idée de n’avoir rien à quoi me raccrocher. « Je te jure que si tu me lâches, je trouverais un moyen de te torturer pour toujours. » Bon, c’est clair que dans la position dans laquelle je suis, je n’ai pas trop la capacité de l’effrayer, mais il ferait mieux de me prendre au sérieux ; juste un peu.

Je ne peux pas cacher ma peur de l’eau à Sander, tout simplement parce qu’elle est ancrée en moi et que je ne peux pas faire semblant de ne pas être effrayée. Ça se voit dans tous les cas très facilement à mon visage. Il essaye de me convaincre de le rejoindre et pour je ne sais quelle raison, je saute le pas. Je me retrouve dans l’eau, sauf que mes instincts primitifs se réveillent et je lui saute littéralement dans les bras. C’est une technique de drague qui fonctionnerait parfaitement avec moi : venir en aide à la jouvencelle en détresse. Et alors que je suis attachée à son cou, il m’explique que m’accrocher au bord aurait été également une solution. Il n’a pas tort, mais quitte à aller dans l’eau à cause de lui, c’est bien à lui de me sauver la vie. Ça n’a pas l’air terrible pour lui, mais ça l’est particulièrement pour moi. Je ne me sens pas bien, j’ai pieds, mais pas totalement. Seulement la pointe des pieds et si je lâche Sander, je sais que je vais paniquer et me noyer comme une idiote. « Non, j’ai déjà essayé d’apprendre à nager une bonne dizaine de fois, mais ça finit toujours de la même manière. Comme ça. » Je lui indique, en lui faisant montrer la position dans laquelle on est. Bien sûr, comme je m’y attendais ma frayeur l’intrigue et il aimerait savoir d’où ça vient. Je perds peu à peu mon sourire, pas très friand de parler de ce détail sur ma vie. Pourtant, je sais que Sander ne sera pas du genre à me plaindre ou s’apitoyer sur mon sort, puisqu’il a lui-même vécu des moments très difficile, dont la perte d’un de ses membres. Je le fixe un instant droit dans les yeux, comme pour lire la réponse quant à mon hésitation de me dévoiler un peu plus, puis je me dis qu’après tout même si on est filmé par des dizaines de caméras et que des millions de téléspectateur nous suivent, la presse people se fera un plaisir de trouver les petits détails sordides sur mon passé et ma famille. « Quand j’étais petite, j’ai failli me noyer. Je suis tombée dans la piscine et mon père était ivre mort juste à quelques mètres de moi. » Je baisse un instant la tête pour ne pas croiser son regard, pas sûr de vouloir lire une quelconque émotion à travers ses yeux.  Je me force de sourire pour éviter qu’on vire dans le mélodrame. « Voilà, c’est pour ça et aussi parce que j’adore être accroché au cou des beaux garçons. » Je plaisante, même si ça ne sort pas de manière naturelle. « Tu me fais faire le tour de la piscine sur ton dos ? » Quitte à m’en servir comme poteau, autant le faire bouger un peu dans l’eau et on passera peut être à autre chose.