il y a quelque chose d’intimidant dans cette pièce. quelque chose qui était déjà là dans cette salle d’attente trop remplie, tout au long des castings. quelque chose qui réside dans l’oeil qui scrute toujours. ceux du jury - panel, peu importe. ceux des caméras surtout. aucun moyen de l’éviter, aucun moyen de se cacher. c’est pourtant une habitude chez lui. d’éviter de se monter, autant qu’il le peut. mais ce n’est pas vraiment ce qu’on trouve au cœur de cette compétition, la discrétion, ni au cœur de ce métier. et il faut bien faire des compromis, quitte à se compromettre un peu, pour avancer. qui sait, tout sera peut-être fini ce soir, et ses mains s’arrêteront peut-être de trembler sans même un mot à son égard. peut-être qu'il disparaîtra, bêtement, simplement. et puis au moins pour le moment, il se noie dans la masse. il n'était pas seul à rentrer dans cette pièce, et s'il en sort, d'un côté ou d'un autre, il ne sera pas seul non plus. il sait bien d'ou ça vient tout ça, cette envie d'être oublié. il sait bien pourquoi il est plus à l'aise loin des autres, loin de tout, sauf de ses idées, de ses livres et de maux qui le hantent un peu. mais maintenant est tout sauf le moment pour les laisser gagner, alors qu'il tire sur ses manches. c'est stratégique, la façon dont il se positionne, presque robotique. la dernière rangée est surélevée. danger. pas les trois premières. la salle fait un peu mal aux yeux, mais le problème n'est pas là. un, deux. trop en avant. pour éviter de se mettre en avant, de se montrer, de se cacher, peut-être juste un peu, la troisième est idéal. pas vraiment en retrait juste. dans la masse. dans la lumière, mais assez perdu au milieu de tous ces candidats pour qu'on l'oublie devant tout ces jolis faciès qu'il a pu côtoyer, ou du moins voir de loin pendant ces fameux castings. ils ont sortis les cotillons, les airs de célébrations, tous, à leur façon. la production surtout. ils espèrent l'audience, probablement. mais il essaie de ne pas y penser. les visages face à eux sont les mêmes que ceux qu'il a déjà pu voir, a un près. aucun jugement, toujours. et toujours, encore, peut-être pour longtemps, cette impression de ne pas être à sa place. mais il saura ce qu'ils en jugent bientôt, si l'endroit est fait pour lui ou pas. il ne devrait pas appréhender autant. devrait juste se dire que c'en est fini pour lui, mais qu'il se sera présenté, aura fait ce qu'on lui a demandé. mais en se passant les mains dans les cheveux, en défaisant plus le travail des petites mains à la coiffure qu'en les remettant en place - et il s'en excuserait s'il s'en rendait compte, vraiment - il n'arrive toujours pas à comprendre pourquoi cette boule qu'il a au ventre. parce qu'il sait bien que ce n'est pas que les caméras. mais si une part de lui voudrait bien entendre son nom, juste pour savoir, juste pour se dire que peut-être on ne lui a pas menti, elle est quelque part au fond de son estomac, bien cachée, cette part de lui, qui aime tant se cacher. s'il devait parler, il le sait, ses mots tremblerait. et pour un moment, il est juste un peu perdu, pour changer, entre raisons et sentiments, mais toujours à regarder ses pieds, pas vraiment droit et les cheveux dans les yeux.

TENUE

+TENUE

Mine de rien, Keven, il stresse à mort. D'accord, tous les participants ont été briefés à fond sur ce qu'on attend d'eux pour la suite des opérations. Mais pour peu qu'il tente de l'oublier, le jeune homme se demande si la boule dans son ventre ne va pas exploser. On leur a bien demandé de s'habiller à la hauteur de l'événement. Donc il s'est vêtu d'un pantalon noir avec quelques griffures, une chemise de la même couleur avec des détails blancs sur le col. Et la touche d'originalité dans tout ça ? Une veste, sombre également, à paillettes, ce qui ne manquerait pas d'attirer les regards sur lui. Double-tranchant. Car s'il ne se voyait pas choisir pour intégrer l'aventure, Keven préférerait disparaître rapidement. Mais ce n'est plus le moment de reculer. La porte de la salle va s'ouvrir dans une poignée de secondes. Tout le monde est sur son trente-et-un, mais le stress rend l'air électrique. On dirait une bande de lions affamés en cache, s'apprêtant à partir en chasse.

...

Let's go ! La pièce est d'une blancheur presque immaculée, ce qui tranche avec les coulisses. Un sourire sur le visage, Keven s'avance à la suite des autres. Il aperçoit @BARBIE, sublime. Il connait sa place, aussi marche-t-il jusqu'au deuxième rang, légèrement décalé sur la droite, tandis que l'ambiance festive est diffusée par de la musique et des décors savamment disposés. Devant eux, Reem, Sandry et Lynch. Ils ont le regard attentif, jugeant sûrement encore et toujours les candidats dont certains laissent paraître leur nervosité. Keven n'a rien à perdre, et il a l'impression que tout va bien se passer. En tout cas il l'espère. Car c'est le grand soir. Alors il se force à respirer calmement malgré le rythme effréné de son coeur. Et il garde malgré tout le sourire, trop heureux d'être là.

Ce soir c’est le grand soir. La fin d’une erre ; celle des castings. Il était temps que cette période s’achève. T’as l’impression que ça fait une éternité que t’es passé devant le jury. L’heure du verdict a bientôt sonné. L’émission ANTM va enfin annoncer le résultat et tu sauras si tu es sélectionné comme candidat pour devenir LE prochain top model américain. Autant dire que ça fou un peu la pression et que ça chamboule légèrement une vie. Tu repenses à ta fille en espérant qu’elle ne soit pas trop déçue du résultat dans l’éventualité où tu ne serais pas sélectionné. Car disons-le, même si tu ne penses pas avoir raté ton face à face avec le jury, tu t’es vite rendu compte dans la salle d’attente et à travers les réseaux sociaux que la concurrence est grande et rude. Quoi qu’il en soit, tu restes assez serein et confiant. T’écoutes les consignes données par la production et tu t’exécutes, une fois entré dans la grande salle blanche en te plaçant dans une des quatre lignes de potentiels candidats sans trop te soucier de qui se trouve à côté de toi. T’observes le jury en face de toi et tu remarques une nouvelle : Reem. T’avais vu une vidéo de l’émission la présentant comme nouvelle membre du panel. Tu ne sais pas encore quoi penser d’elle. T’écoutes attentivement les annonces en espérant que ton nom soit prononcé pour devenir candidat.

+ tenue

Ce soir, c’est le grand soir… L’heure du premier panel est venue. L’annonce des sélectionnés va avoir lieu et il est temps pour moi de me jeter dans ce grand bain qu’est ANTM 01. Avant tout de chose, je me suis fait une promesse avant d’y aller, celle de toujours resté moi-même tout en suivant les conseils des juges. D’ailleurs, en parlant de ça, afin de ne pas m’attirer leurs foudres, j’ai décidé avant cette date de réajuster un tant soit peu en mon look en optant pour une barbe taillée qui me donne une allure moins négligée et des vêtements à la fois simples et élégants. Le casting, c’est déroulé hier et je stresse un peu à l’idée de rencontrer pour la première fois le panel dans son intégralité. Pourtant me voilà, prêt, coiffé, habillé, maquillé dans cet immense couloir. Je marche tête haute et entre dans cette salle d’un blanc immaculé. Le panel est là au grand complet, Lynch et Sandra que j’ai déjà rencontrés et un nouveau visage. Enfin, pas si nouveau que ça dans le monde de la mode, Reem Parson. Je m’installe à la place qui m’a été attribué face au panel et attend, curieux de savoir ce qui se passer, mais en même temps sûr de moi. Mon entretient c’est bien passé et je pense être pris, sauf mauvaises surprises, bien sûr.

C’était le grand soir. La soirée de lancement de America’s Next Top Model. Tu avais participé au casting, tu avais eu une espèce d’interview avec des professionnels, et depuis, tu attendais patiemment cette soirée pour avoir le résultat. Honnêtement, tu n’étais pas si sereine que ça. Les professionnels avec lesquels tu étais passée t’avaient bien fait comprendre que tu n’étais pas si jeune que ça, et que commencer une carrière de mannequin à ton âge, ce n’était pas vraiment recommandé. Mais tu leur avais tenu tête. Tu leur avais montré que tu étais motivée, et prête à t’investir autant que possible dans cette nouvelle aventure. Non, tu n’avais pas envie qu’on te dise que ce ne serait pas possible, tu avais même peur de ça. Tu savais que ce soir, tu allais te trouver entourée des mêmes personnes que tu avais croisé lors de ce casting. Tu n’avais pas parlé à grand monde, à l’exception de Bianka. Tu aurais sans doute dû te montrer plus avenante et aller vers les gens. Mais c’était trop tard. À toi de te démarquer ce soir. Il fallait bien le dire, le commentaire un peu piquant d’un professionnel, qui avait donné son avis sur toi en disant que tu n’avais pas une allure de mannequin, mais plutôt d’actrice, t’avais un peu marqué. Alors tu avais opté pour une robe qui t’avait coûté un bras, mais qui au moins, faisait assez classe et sophistiquée. Si tu avais brillé par ta simplicité lors de l’entretient, là, ce n’était pas la même chose. Cette robe, des talons hauts noirs, simple, pas trop de maquillage, et tes cheveux détachés. Tu te sentais prête. Enfin, non, pas vraiment. Dans ton cerveau, c’était Bagdad. Mais tu n’avais plus le choix. C’était l’heure, il fallait y aller. Les personnes de la production te dirigent vers cette grande salle blanche, avec le sol rempli de ballons. Tellement blanc que ça piquerait presque les yeux. Tu vois les jurys en face de toi, tu leurs adresses un petit sourire avant de venir monter sur l’un des quatre rangs, où tu as de la place. Tout le monde est foutrement bien habillé, tu espères ne pas faire trop tâche dans le paysage. Foutue confiance… Tu écoutes ce que le jury a à dire, ou du moins, tu attends d’écouter. Tu regardes un peu autour de toi. Il y a ce gamin qui a l’air si jeune. À s’y méprendre, il ressemblerait presque à ton petit frère, les boucles blondes en moins. Il y a aussi ce type avec ses tatouages, cet autre type, plutôt très mignon avec son chapeau. Cette fille, qu’on croirait tout droit sorti d’un film glamour des années 30. Bref, tu te rends bien compte que vous avez tous l’air bien différent. Maintenant, il n’y avait plus qu’à attendre...

+ tenue

Les castings sont officiellement terminés. Je vais enfin savoir si ma vie va prendre un tournant ou si au contraire, je vais devoir tout recommencer. Je suis complètement stressée, mais je ne dois pas me laisser submerger par mes émotions. L’important pour le moment c’est de trouver la robe parfaite. Malheureusement, je retourne ma valise deux trois fois et je ne trouve rien qui me convient. Heureusement, je suis à Los Angeles, trouver une robe de soirée est tout à fait possible, même en très peu de temps. Il me suffit de faire deux magasins pour trouver la robe parfaite à mes yeux, bien que je ressors également avec beaucoup trop de sachet. Mon côté dépensière. Je mise donc pour ce soir sur une petite robe noire classique, que j’accessoirise avec une paire d’escarpin rouge. Mes cheveux relevés à l’arrière pour dégager mon visage dans un espèce de chignon faussement négligé, privilège d’être coiffeuse, j’ai besoin de personne pour gérer ma tignasse de lionne. Niveau maquillage, je n’en fais pas trop. De quoi cacher le vilain bouton de stress qui vient de pointer son nez. Il est l’heure. Je marche en compagnie de toutes les autres personnes qui attendent, impatiemment, de savoir le résultat. Je reconnais certains visages que j’ai pu croiser lors du casting, mais je ne dis rien. Je m’avance simplement là où on m’a demandé d’être. Deuxième rang, pratiquement au milieu, entre des mannequins gigantesques et d’une incroyable beauté. Je souffle assez fort, pour reprendre un peu de courage, sauf qu’en me mettant en place j’écrase le pied de la personne à côté de moi. « Oh, désolé. » Une vraie empotée, je me fais très petite pour le coup, histoire que ma victime ne me pète pas un plomb dessus et qu’on ne se fasse pas remarquer dès le premier soir.

Chaleur, chaleur, chaleur. L’atmosphère est lourde, chargée d’un air brûlant reflétant le stress ambiant. Arrivée à une heure raisonnable, Bianka passe la majeure partie de son temps à osciller entre le maquillage, la coiffure et les vestiaires où les corps bouillant se  percutent. L’air est lourd, chargé d’appréhension et de peur du résultat tant attendu. Totalement imperméable aux agitations de ses camarades, elle se contente de rester dans son coin et d’enfiler sa tenue dans un calme plus qu’olympien. Le monde autour d’elle semble trembler, elle ne compte plus le nombre de mains un peu trop agitées qui l’entourent. Discrètement elle se glisse sur une chaise afin d’être prise en main par les équipes techniques. Tant pis si la jeune fille avant elle attendait depuis plus longtemps. Il faut savoir être opportuniste. En un rien de temps tout s’agite autour d’elle. Sa coiffure à peine terminée et les candidats sont amenés à se rendre sur le plateau, là où tant de rêves se briseront. D’un démarche aérienne, la brunette suit le mouvement de la troupe d’apprentis mannequins. La joyeuse assemblée atterrit dans une salle blanche immaculée, on se croirait dans un trip sous acide, d’autant plus que le sol est recouvert de ballons multicolores. Un peu prise de court, la jeune femme met quelques secondes avant de comprendre lorsqu’un assistant lui indique de sa placer sur la troisième ligne de candidat. Elle se hisse sur le podium un peu impressionnée par l’atmosphère d’un plateau télévisé. Le panel se tient face à eux, concentré, leurs visages ne trahissant aucune émotion quant au déroulement de cette soirée. Pourtant même dans une atmosphère aussi pesante, Bianka laisse un léger sourire se dessiner sur ses lèvres. C’est son moment. Son rêve, elle le touche du bout des doigts.

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